mardi 11 décembre 2018

Victor Hugo, Shakespeare, Byron, et Goethe

« Maintenant, je demanderai si l’on trouvera, en cherchant minutieusement, non pas dans notre histoire seulement, mais dans l’histoire de tous les peuples, beaucoup de poètes qui soient, comme Victor Hugo, un si magnifique répertoire d’analogies humaines et divines. Je vois dans la Bible un prophète à qui Dieu ordonne de manger un livre. J’ignore dans quel monde Victor Hugo a mangé préalablement le dictionnaire de la langue qu’il était appelé à parler ; mais je vois que le lexique français, en sortant de sa bouche, est devenu un monde, un univers coloré, mélodieux et mouvant. Par suite de quelles circonstances historiques ; fatalités philosophiques, conjonctions sidérales, cet homme est-il né parmi nous, je n’en sais rien, et je ne crois pas qu’il soit de mon devoir de l’examiner ici. Peut-être est-ce simplement parce que l’Allemagne avait eu Goethe, et l’Angleterre Shakespeare et Byron, que Victor Hugo était légitimement dû à la France. Je vois, par l’histoire des peuples, que chacun à son tour est appelé à conquérir le monde ; peut-être en est-il de la domination poétique comme du règne de l’épée. »

— Charles Baudelaire

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